Projet mêlant science-fiction, animé et survival-horror, le tout teinté de multiples inspirations artistiques, SIGNALIS intrigue. Une création qui réussit à trouver de l'originalité dans des thématiques pourtant largement utilisées dans le jeu vidéo.
C'est au petit studio rose-engine que l'on doit SIGNALIS. Le titre, édité par Humble Games, est annoncé depuis quatre ans, soit une durée plutôt longue, mais qui s'explique par la petite taille de l'équipe au regard de la qualité globale du jeu. Cette qualité, elle se traduit au travers de plusieurs éléments importants et c'est ce qu'on va voir ici.
Androïde pas paranoïde
Si l’œil est attiré directement par l'esthétique du titre, et on y reviendra dans la deuxième partie, l’entrée en matière de SIGNALIS rend directement le jeu intéressant. Une mise en situation qui va à coup sûr ravir les fans de science-fiction, adeptes d'intrigues cryptiques et de personnages mystérieux. On joue Elster, une androïde ou plutôt une Replika comme ils sont nommés, perdue suite à un crash de vaisseau et dont l’aventure prend vite un virage inattendu. Des bouleversements que l'on peine à comprendre au départ, mais dont on constate vite les liens, au fur et à mesure du jeu, avec le monde dans lequel Elster évolue.
Un régime politique autoritaire et impérialiste comme la SF sait en faire beaucoup, une alliance entre l'Europe et l'Asie illustrée par des idéogrammes et messages chinois et allemands. Une toile de fond pas forcément impactante pour l’histoire, mais qui a le mérite de donner un cadre tout le long du jeu par des indices visuels et une imagerie militariste. En réalité, le véritable fil rouge du jeu, c'est la condition d’androïde de la protagoniste. Car on a beau se trouver dans des environnements oppressants, hostiles et même horrifiques, SIGNALIS est porté par une quête d’identité, de mémoire, et de sens. Des cinématiques inspirées de l'animation japonaise entrecoupent le jeu à différents moments de l'aventure. Des moments sans dialogues ou presque, très évasifs, mais portés là encore sur ce que vit Elster.
Le titre de rose-engine réussit à nous montrer cela aussi plus simplement, par une interface pertinente. La santé, l’inventaire, la carte, les messages consultés et indices, et même plus tard dans le jeu l’extension radio, tout cela s'intègre à travers des modules qui forment les différents menus en jeu. Une mise en forme intelligente, claire et efficace, pour nous rappeler ce qu'est notre personnage, même dans ces phases hors gameplay. Cette même interface ne saurait toutefois avoir le même impact sans bénéficier, à l'instar de tout le jeu, d'un excellent travail réalisé sur l'esthétique.
Sublime cauchemar
Parlons déjà de l’ambiance générale. En se plaçant comme une sorte de chaînon manquant entre le rétro PS1 et le pixel art, SIGNALIS brille par son esthétique. Un choix audacieux qui se veut un rappel aux anciennes heures de gloire de l’angoisse vidéoludique. Impossible de ne pas y voir un moyen de titiller la fibre nostalgique d'une époque révolue. J'abordais juste avant les menus et effectivement, la touche artistique PS1 est parfaite ici : le filtre type d'écrans cathodiques, les flous et les couleurs désaturées, tout cela crée un visuel rétrofuturiste de qualité. Cela est d'autant plus pertinent que cela fait sens au regard du rétrofuturisme des technologies de l'univers du jeu. À noter que vous pouvez désactiver le mode CRT dans les options pour celles et ceux qui le souhaitent.
Passons ensuite aux environnements. Les décors sont fouillés, détaillés et tirent pleinement parti d'un très bon pixel art. Compréhensible, car les deux personnes derrière le studio rose-engine, Yuri Stern et Barbara Wittmann, ont un parcours autant lié à l’illustration qu'au développement. SIGNALIS est beau aussi par la gestion des lumières. En tant que jeu d'angoisse, cette variable est forcément cruciale puisqu’elle va jouer sur la vision de l’espace dans lequel la protagoniste évolue. Et lorsque l’on récupère la lampe de poche, nécessaire pour certaines pièces non éclairées, on constate encore mieux le travail réalisé sur cet aspect.
Il y a un côté artistique dans les jeux d'ombres et de lumières avec ces graphismes, créant une atmosphère vraiment particulière. Une dimension presque symbolique qu'on retrouve même avec la présence de peintures minimalistes disséminées un peu partout, mais surtout une bien reconnaissable, immanquable et centrale : l'île des Morts de Böcklin (et dans ses nombreuses autres versions, mais je n'en dis pas plus).
J’en profite pour parler rapidement de la caméra. Son placement en vue de haut rappellera à certain(e)s Metal Gear Solid ou Vagrant Story et est clairement là pour appuyer une fois de plus la nostalgie PS1. Mais à cela s'ajoutent des phases à la première personne. Que ce soit lors de la résolution d’énigmes (code à entrer sur un coffre, ouverture d’un mécanisme important, etc.), mais aussi lors de quelques rares séquences libres, comme lorsque l’on récupère le module radio ou bien plus tard, sur une mystérieuse plage. Ces moments sont très intéressants parce qu’ils créent un changement d’ambiance, un peu plus légère, plus respirable et graphiquement extrêmement bien pensée. Un choix qui révèle aussi à quel point le reste du jeu est fait pour oppresser.
Ces accomplissements visuels sont appuyés par une ambiance sonore lourde, tantôt puissante, tantôt lancinante. La musique est plutôt discrète, mais gagne en intensité lors de phases plus cinématiques ou, évidemment, en combat. Un ennemi qui nous repère et directement les percussions s'emballent et s'accompagnent de sonorités grinçantes qui cesseront seulement une fois celui-ci mis K.O. ou grâce à la fuite dans une autre pièce. Les bruitages des pas qui résonnent, ceux des tirs, ou même des menus, tout cela participe également à la réussite de SIGNALIS.
L’angoisse spatiale
En choisissant un gameplay mêlant Resident Evil, Silent Hill et Dead Space, SIGNALIS tape juste. La lenteur générale est trompeuse, car elle est là pour rendre les phases d'action beaucoup plus impactantes, nous ramenant à ce mélange de cyberpunk et d’horreur en huis clos. Les enchaînements de petites pièces aux lumières blafardes et aux murs et sols teintés de sang font naître l'angoisse et la crainte de la rencontre d'un ennemi ou de plusieurs. Puisque ces espaces réduits rendent difficiles les déplacements, cela entraîne fatalement l'affrontement direct contre ceux qui sont, comme on le découvre vite, des androïdes corrompus.
Pour se débarrasser d'eux, on aura un nombre d'armes qui, même s'il va s'accroître au fil du jeu, reste limité. Une limite renforcée par deux éléments. Le premier, c'est la gestion des munitions. En quantité réduite, il faudra les utiliser avec intelligence, ne serait-ce que pour en avoir lors des phases de « boss ». Ces très rares « boss fights » sont assez pauvres d'ailleurs et méritaient mieux que ça. Le second, c'est l'inventaire qui ne possède que 6 emplacements. Un outil, une arme et des munitions pour celles-ci et votre inventaire est déjà à moitié plein.
D'autant que l'on ne peut déposer les ressources et items que dans les pièces où se trouvent les points de sauvegarde, ou il faudra les détruire. Alors, il suffit de devoir obtenir des objets pour une énigme puis de tomber par chance sur un endroit où se trouvent des ressources intéressantes pour être face à un choix cornélien : un aller-retour pour faire de la place ou laisser ces ressources de côté ?
Justement, ces allers-retours sont nombreux, un peu trop à mon goût (surtout si vous avez mon sens de l'orientation) et cela malgré une carte très lisible. Avec ça, les ressources pour détruire définitivement les « zombies » n'arrivant que tard dans le jeu et étant rares, ils seront plutôt mis K.O. par les armes. Ce qui signifie qu'au bout d'un certain temps, ils se relèvent, créant une forme de compte à rebours angoissant pour savoir s'ils se relèveront au prochain passage. Une tension qui pousse à la fois à une meilleure gestion des ressources et à bien réfléchir aux déplacements dans les niveaux. Un côté labyrinthique qui renvoie finalement un peu à la longue quête d'Elster pour comprendre tout ce qui lui arrive et les événements autour d'elle.
SIGNALIS a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur. Le jeu est également disponible sur PS4, Xbox One, Nintendo Switch et Xbox Series.
Que dire de plus pour vanter ce qui est clairement un coup de cœur ? L’esthétique rétro s’intègre à merveille avec le travail de lumière fourni par les technologies actuelles, créant une ambiance prenante même si elle ne plaira pas à tout le monde. Un choix intelligent pour un titre trouvant ses inspirations dans Dead Space, Neon Genesis Evangelion, Resident Evil ou même Blade Runner. On peut déplorer des boss fights anecdotiques et des allers-retours trop nombreux. Mais si vous cherchez un jeu d’horreur à l’ancienne, ancré dans un univers SF, SIGNALIS est définitivement dans ce qui se fait de mieux. Et si vous avez le GamePass, il est accessible dès sa sortie, le 27 octobre.
Les + | Les - |
- Graphismes entre pixel-art et retro PS1 | - Un peu trop d'allers-retours |
- Ambiance horreur SF prenante | - Combats de boss faiblards et pas utiles |
- Difficulté des énigmes bien dosée |
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