Planet of Lana, c'est ce jeu qui vous a presque assurément fait de l'œil si vous êtes tombés sur un de ses trailers. Une direction artistique d'exception, mais pas seulement, puisqu'il s'agit d'une aventure jalonnée de petits puzzles, accompagnée d'une bande originale envoûtante et portée par le lien touchant entre Lana et la petite créature qui va l'accompagner, Mui.
On ne dirait pas comme ça, mais Planet of Lana est le tout premier jeu de Whishfully. Mais tout s'explique vite quand on comprend que le studio suédois, fondé en 2018, a dans ses équipes quelques anciens de l'animation, du cinéma et plus globalement des années d'expérience dans le domaine de la vidéo. On n'est pas surpris non plus d'apprendre que le programmeur en chef n'est nul autre qu'un co-fondateur de Tarsier Studios, à l'origine des deux Little Nightmares. Mais dites donc : un groupe de développeurs qui mêle connaissances de l'esthétique cinématographique et de gameplay en fausse 2D avec des puzzles, est-ce qu'on n'aurait pas là un peu les bases de Planet of Lana ? Je crois bien que si.
Danger zone
Le jeu débute dans un idyllique village sur pilotis, où semblent régner calme, et insouciance. Lana part rejoindre sa sœur Elo dans la forêt adjacente pour un court passage devant deux tombes qu'on imagine être celles de leurs parents. Les sœurs s'installent ensuite pour contempler l'horizon jusqu'à ce que des objets étranges se mettent à tomber du ciel. On comprend vite que la planète, Novo, est envahie par des robots menaçants, dont un qui profitera de la confusion des deux filles pour capturer Elo. Apeurée, Lana parvient néanmoins à s'échapper pour retourner au village. Mais elle constate que ce dernier a été pris d'assaut par les robots et que les habitants, à l'instar de sa sœur, ont été capturés pour être, apparemment, emmenés ailleurs. La séquence se poursuit, entre fuite de plusieurs menaces et poursuite du robot-vaisseau transportant sa sœur.
Cette phase d'introduction permet de poser plusieurs bases de Planet of Lana. La première, c'est le caractère éminemment cinématographique des séquences de jeu, puisque l'environnement fourmille de petits détails qu'on a parfois à peine le temps d'observer (on reviendra en détail sur ça dans la dernière partie). La deuxième, c'est la toute-puissance des ennemis, ou en tout cas, l'impuissance de Lana. Celle-ci n'est pas armée pour affronter les robots et c'est à nous de faire en sorte que ceux-ci ne la repèrent pas. La troisième, c'est l'intégration de puzzles formant des sortes de points d'étape dans le parcours de Lana.
Tout cela s'imbrique parfaitement : on profite d'une aventure poignante et visuellement irréprochable, parfois entrecoupée de casse-têtes qui fonctionnent parce qu'on sait que Lana ne doit pas être découverte et que les éléments à l'écran ont un sens dans l'environnement. Telle caisse est là parce que les robots ont déposé du matériel, tel animal va avoir telle réaction parce que c'est son comportement de base, etc. À la manière d'un Inside ou d'un Limbo, deux inspirations assumées de Wishfully, il y a une forme de narration environnementale qui participe à notre implication dans le jeu et à la crédibilité de l'aventure. C'est aussi ce qu'on ressent concernant la relation entre Lana et Mui.
Lana telle Rey
La rencontre avec Mui sert en quelque sorte de fin de séquence introductive. On sauve cette petite créature noire, au design proche du chat, d'un destin sûrement tragique, qui très vite s'attache à Lana et réciproquement. Ce lien permet à la protagoniste de donner des ordres à la créature (avant que vous le demandiez, oui, il est possible de caresser le "chat") tels qu'attendre, suivre et actionne. Forcément, l'utilisation de ces commandes va être au cœur de la résolution de nombreux puzzles.
Un peu plus loin dans l'aventure, Mui et Lana obtiennent de nouvelles capacités. Mui peut contrôler mentalement certaines créatures et Lana peut "pirater" des robots pour en prendre le contrôle ou tout simplement les désactiver. La combinaison de ces deux possibilités, s'ajoutant aux commandes précédentes, augmente les manières de résoudre les énigmes, même si la plupart du temps, il n'y a qu'une seule et unique solution pour passer. À ce titre, on peut regretter des puzzles à la difficulté peu relevée et dont la complexité viendra surtout de mauvais timing de déplacements. Mais c'est aussi parce que ces passages sont là pour rythmer le jeu et pas spécialement offrir un challenge à surmonter.
Au-delà de la bonne coopération entre Lana et Mui, c'est la nature même de leur relation qui est une grande réussite. Dans Planet of Lana, les habitants de Novo ont leur propre langage qu'on ne va jamais découvrir, mais dont on reconnaît vite des expressions et leur signification, parce que Lana en fait une utilisation récurrente. Quelque chose qu'on retrouve dans des jeux comme Ico ou The Last Guardian (autre grande inspiration de Wishfully pour le développement, on en reparle là encore dans la dernière partie). Elle s'adresse souvent à Mui, essentiellement lorsqu'on donne des ordres, qui lui répond par des petits bruits, et lors de passages où les deux errent dans de vastes étendues désertes, il y avait quelque chose qui m'a rappelé un peu Rey dans Star Wars VII qui avance dans le désert avec à ses côtés BB-8. Une manière d'humaniser la relation et qui renforce notre lien avec les personnages. En seulement quelques heures, le jeu parvient avec brio à nous faire nous attacher à ces deux protagonistes, rendant la quête de départ de Lana, retrouver sa sœur, passionnante.
Voyage enchanteur
Pour un jeu qui se présente comme "cinematic puzzle adventure", vous vous doutez bien qu'il faut quand même parler un minimum de ce "cinematic". Planet of Lana nous transporte à merveille dans son univers avec les éléments qu'on a pu voir au-dessus, et aussi, en grande partie, par le soin apporté à son esthétique. Visuellement, c'est d'une beauté folle. Les effets de profondeur, avec souvent nos personnages qui ne se trouvent pas au premier plan, mais au deuxième voir au troisième, et d'autres couches suivent parfois avant d'arriver à l'arrière-plan. Les perspectives sont maitrisées, les décors détaillés, les environnements changeants au fur et à mesure de la progression, en clair, c'est une claque. Je ne compte pas les captures d'écran qui peuvent servir de fond d'écran, à ce niveau, c'est quasiment un générateur dédié.
Certains y verront des traces de Ghibli et ils auront raison. Les œuvres de Miyazaki comptent parmi les plus importantes sources d'inspiration de l'équipe pour l'ambiance et le design général. De plus, tout cela est servi par une attention particulière accordée à la mise en scène. Quelque chose qui passe par l'animation des arbres, de l'eau, des machines, des personnages : il y a de la vie. Parfois, la caméra s'éloigne pour nous faire profiter d'une vue d'ensemble magnifique ou pour nous indiquer la présence d'une menace à venir. Parfois, elle se rapproche afin de remarquer un petit détail ou simplement pour nous montrer une interaction entre Lana et Mui.
Ces efforts de mise en scène passent bien sûr aussi par la musique. Impossible, en effet, de ne pas parler de l'accompagnement par une bande-son d'exception. Elle est le fruit du travail de Takeshi Furukawa, compositeur notamment du jeu The Last Guardian. Un choix judicieux parce que Planet of Lana possède quelques similitudes avec le titre de Fumito Ueda (lien entre deux protagonistes dont un est un animal attachant, beauté de l'environnement, puzzles, gigantisme). Au fil de l'intrigue, les musiques nous transportent et mettent en valeur l'intensité comme la douceur de ce qui se passe à l'écran. Si le gameplay puzzle nous ramène régulièrement au jeu vidéo, la grandeur cinématographique est représentée par de longues séquences de contemplation où l'on avance sans frein vers la droite de l'écran en profitant de la musique.
Planet of Lana a été testé sur PC via une clé fournie par l'éditeur. Il est également disponible sur Xbox One et Series.
Planet of Lana réussit parfaitement à atteindre ce qu'on attendait de lui dès les premières images de jeu : proposer une aventure touchante dans des environnements exceptionnels et avec en fond une bande-son de folie. Des phases de puzzles rythment en plus ce sublime voyage, et s'ils ne sont pas très complexes, ils jouent un rôle essentiel dans le renforcement du lien entre Lana et Mui. Une splendide parenthèse de 4 à 6 h, de quoi en faire le parfait candidat pour mettre en pause votre addiction à Zelda: Tears of the Kingdom.
Les + | Les - |
- Bon dosage entre phases de gameplay et de quasi-contemplation | - Mouvements de la protagoniste parfois trop lents |
- Attachement rapide aux deux personnages | - Puzzles plutôt simplistes |
- Direction artistique magnifique | |
- Bande originale grandiose |
Veltar
Joueur de jeux vidéo qui aime la politique. Du coup j'écris surtout des trucs qui parlent des deux. Stratégie, Outer Wilds, Metal Gear Solid et indés en pixel art.
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